Les confidences de Maria Grazia Chiuri, directrice artistique chez Dior
La directrice artistique de la maison Dior, Maria Grazia Chiuri, a un faible pour les accessoires, dont les sacs à main.
Entretien avec Maria Grazia Chiuri, la directrice artistique de Dior, à qui l’on doit certains des sacs à main les plus convoités de ces deux dernières décennies.
Quand elle sort, Maria Grazia Chiuri (56 ans) prend toujours au moins deux sacs à main. La directrice artistique de Dior dit être “légèrement obsédée” par les sacs. Même quand elle retourne à Rome auprès de son mari Paolo et de leurs deux enfants, après une semaine à Paris, elle en a toujours deux.
C’est d’ailleurs ce style de vie nomade qui lui a inspiré une de ses premières créations pour la maison de luxe: le Book Tote, un sac fait pour emporter des livres - la lecture est le passe-temps favori de la créatrice. Ou un laptop ou, pourquoi pas, une paire de chaussures neuves.
“Les sacs à main sont une sorte de langage qui exprime le style de femme que l’on souhaite être.” Maria Grazia Chiuri Directrice artistique de Dior
Les observateurs ne sont pas surpris qu’aujourd’hui, une femme soit à la barre chez Dior -la première en 74 ans d’histoire de la maison-, ne serait-ce que pour souligner qu’un certain pragmatisme constitue une priorité. Trois ans après l’arrivée de Chiuri, à une époque où nous pouvions encore voyager, il suffisait de se rendre dans un aéroport pour repérer un de ses sacs arborant le célèbre logo Dior.
On en voyait également dans les pages des magazines, au bras de Rihanna ou de Jessica Alba (une version personnalisée bien évidemment). Et voilà pourquoi la valeur de revente d’un sac Dior est élevée, parfois plus que son prix de départ.
Vue en plein écran Dernier-né des créations maroquinières de Dior, le Caro, est un hommage à la sœur de Christian Dior, Catherine, que l’on surnommait “Caro”. ©Lean Lui
Maria Grazia Chiuri a une vision précise du pouvoir de transformation de la mode: “Notre mode de vie a complètement changé: nous passons davantage de temps à la maison. Notre attitude s’est modifiée, elle aussi. Parfois, on est déprimé et on préfère ne pas se regarder. Parfois, on s’habille juste pour soi, pour se sentir bien, le temps d’un instant.”
“Quand on ne peut faire de shopping qu’en ligne, le sac à main est l’achat le plus évident.” Maria Grazia Chiuri Directrice artistique de Dior
Quand on ne peut faire de shopping qu’en ligne, le sac à main est l’achat le plus évident: inutile de choisir la taille ni de l’essayer. C’est pourquoi les ventes d’accessoires intemporels se sont envolées, certaines fans de mode investissant dans un sac à main la somme qu’elles auraient dépensée en vacances ou en sorties. La plateforme Net-A-Porter a enregistré une augmentation de 84% des ventes de sacs en 2020 par rapport à l’année précédente. Plus important encore: un sac à l’épaule est un statement, un symbole d’espoir: il déclare que nous allons bientôt pouvoir sortir à nouveau.
Baguette magique
La directrice artistique de Dior, Italienne et Méditerranéenne revendiquée, continue de trouver tout cela fascinant. Mais, en matière de nouveaux “it bags”, elle est une version contemporaine de Midas. Elle transforme en or tout ce qu’elle touche. Née et élevée à Rome, la créatrice a passé les 27 premières années de sa carrière chez Fendi et Valentino.
Chez Fendi, elle a fait partie de l’équipe responsable de l’iconique sac Baguette, considéré comme le premier sac de la pop culture. La série “Sex and the City” l’avait rendu célèbre. Ensuite, pendant les 17 années qu’elle a passées chez Valentino, Maria Grazia Chiuri a créé la collection Rockstud, autre best-seller. Deux succès qui ont généré des revenus gigantesques pour les maisons de mode italiennes, la maroquinerie étant en général le département le plus rentable des marques de luxe.
Vue en plein écran Après avoir fait ses armes chez Fendi et Valentino, Maria Grazia Chiuri a développé un vrai feeling pour déceler le succès potentiel d’un accessoire. C’est à elle que l’on doit, notamment, le Book Tote de chez Dior. ©Pol Baril
Bien entendu, le fait que la créatrice ait le flair pour déceler avec précision l’accessoire qui fera mouche n’a pas échappé à Dior. En 2016, elle était nommée directrice artistique des collections femme de Dior, soit le prêt-à-porter, la haute couture et les accessoires. En quatre ans, elle a redéfini le légendaire “new look” de la maison, en présentant des T-shirts barrés de slogans et des jeans de designer comme des robes du soir ou des merveilles pour les tapis rouges.
En 2019, elle reçoit la Légion d’honneur pour son engagement en faveur du féminisme, un parti pris visible dans ses créations pour Dior, et plus précisément sur les T-shirts.
Style bourgeois et punk
La maison Dior est souvent qualifiée de première marque au sein du portefeuille du groupe de luxe LVMH, qui pèse un milliard de dollars. Malgré la baisse des bénéfices observée l’année dernière suite à la pandémie, le groupe (également propriétaire de Louis Vuitton, Celine, Loewe et Fendi) a déclaré, dans un communiqué, que Dior a fait preuve d’une résilience remarquable, tout en confirmant l’attrait exceptionnel du label, qui a vu sa part de marché augmenter dans toutes les régions du monde.
“La fabrication d’un accessoire requiert la même créativité, les mêmes connaissances et la même technique que la couture.” Maria Grazia Chiuri Directrice artistique de Dior
Quel est donc le secret de Chiuri pour réaliser un tel exploit à une époque où personne ne fait de shopping ni ne sort, et où les rares à le faire n’ont pas besoin d’un sac à main?
“Pour qu’un sac à main soit un succès, il faut proposer quelque chose de vraiment neuf, qui n’est pas encore sur le marché”, explique-t-elle. “Avant le lancement du Baguette, on ne parlait que des sacs en nylon noir Prada. Le Baguette était tout le contraire: brodé et coloré, original et ludique. Quand nous avons conçu le Rockstud, c’était tout à fait inhabituel d’orner des sacs à main de studs. Et puis, il est devenu très élégant, à la fois bourgeois et punk.”
S’il existait un hall of fame pour les sacs à main, les créations de Chiuri se disputeraient la première place. En 2018, la réédition du Saddle a bénéficié d’un lancement atypique - il n’a duré que 24 heures et a misé sur les réseaux sociaux -, qui l’a mis au bras de top models comme Rosie Huntington-Whiteley ou Kendall Jenner.
Vue en plein écran En quatre ans, Chiuri a redéfini le légendaire “new look” de la maison.
Ce sac avait été conçu en 1999 par John Galliano, alors directeur artistique de Dior, mais l’Italienne l’a remis en scène en le réinterprétant en cuir d’agneau et broderies de perles et de paillettes. Un objet ultra désirable, surtout pour les millennials!
“Je suis arrivée chez Dior avec mon propre sac Saddle à l’épaule. Cela aurait été fou de ne pas l’avoir relancé!”, déclare aujourd’hui l’Italienne. “La fabrication d’un accessoire requiert la même créativité, les mêmes connaissances et la même technique que la couture. Non, je ne veux pas que cette icône de l’histoire de la maison Dior tombe dans l’oubli.”
Lady Di
Pour les clientes les plus exigeantes, il y a le Lady Dior, un sac à main très féminin, surpiqué de l’emblématique motif cannage, ainsi nommé en honneur à la princesse Diana qui le préférait en noir. Sous la houlette de Chiuri, ce Lady Dior a également été revisité: en velours brodé à la main, en format miniature et orné de charms Dior.
“Lady Diana a fait de ce sac une légende. Il ne faut pas oublier que les accessoires également se sont mués en une sorte de langage signifiant quel style de femme vous souhaitez être. Le Lady Dior s’inscrit dans cette tradition”, précise Chiuri.
“Quand je porte un sac Lady Dior, je suis un peu comme Lady Di, c’est une forme d’imitation. Il en va de même pour le sac Kelly (Hermès, NDLR). Devenir une princesse est un rêve et ce rêve devient accessible quand on porte ce sac. C’est comme un conte de fées, mais pour les femmes adultes.”
Y aurait-il une femme iconique derrière chaque sac iconique? “Oui, et c’est également vrai pour les sneakers”, répond Chiuri. “Si on se penche sur la success-story des sneakers, on voit qu’il y a toujours la présence d’un acteur iconique.”
Choix surprenant
Il y a longtemps, Chiuri suppliait sa mère de lui prêter un sac Gucci ou Hermès et, chaque fois, elle essuyait un refus. Elle avait aussi pris l’habitude d’écumer les marchés aux puces à la recherche de sacs vintage. Enfant, elle avait demandé à ses parents si elle pouvait visiter le musée des sacs à main de Salzbourg, car il fallait absolument qu’elle voie ça. Pendant que d’autres enfants lisaient des romans, elle se plongeait dans un livre consacré au célèbre créateur de souliers Salvatore Ferragamo.
“À cette époque, il n’y avait pas beaucoup d’expositions consacrées aux souliers ou aux sacs, et ce livre sur le travail de Ferragamo me fascinait au plus haut point. Cette facette du design de mode m’a intéressée dès le départ. Oui, je me considère comme une créatrice d’accessoires dans l’âme.”
“À l’école, personne ne disait qu’il voulait créer des accessoires.” Maria Grazia Chiuri Directrice artistique de Dior
Quand Maria Grazia Chiuri termine ses études à l’Istituto Europeo di Design à Rome, dans les années 1980, elle travaille comme créatrice d’accessoires, un choix très surprenant à l’époque. “Les autres créateurs voulaient travailler dans le prêt-à-porter et la haute couture; les accessoires étaient un second choix. À l’école, personne ne disait qu’il voulait créer des accessoires”, se souvient-elle. “Moi, j’avais une obsession pour les chaussures et les sacs, c’était ma passion.”
Au fil des ans, la créatrice a accumulé une impressionnante collection d’accessoires chinés aux quatre coins du monde, au point qu’il lui est impossible de dire combien de pièces la composent. “Il y en a vraiment beaucoup!”, s’exclame-t-elle en riant. Et sa fille Rachele, 24 ans, qui l’inspire et lui sert de caisse de résonance, ne peut y farfouiller qu’exceptionnellement.
“Je me souviens que, lorsqu’elle avait 16 ans, je l’ai trouvée dans mon dressing avec des copines, juste avant de partir à une soirée. J’ai tout de même dû intervenir”, sourit Chiuri. “Il arrive aussi qu’elle me surprenne, en ressortant de mes archives des sacs dont j’avais complètement oublié l’existence.”
Le sac Caro
La maison Dior vient de lancer le sac Caro, un hommage à Catherine, la sœur de Christian Dior, surnommée Caro dans le cercle familial. Ce sac est doté d’une bandoulière chaîne et d’une fermeture à rabat ornée du fermoir CD. Ce sac élégant peut également être porté “cross body” pour garder les mains libres. Comment avoir la certitude qu’on va concevoir et lancer un sac à succès? Bien que Chiuri ait déjà répondu mille fois à la question, cela ne nous empêche pas de la lui reposer.
“Un it-bag n’est un succès que s’il est convoité par des gens qui ne connaissent pas l’histoire qui se cache derrière et qui ne savent pas quelles sont les techniques utilisées”, explique-t-elle. “S’il y avait une formule magique pour lancer un ‘it bag’ ou une carrière de star, n’importe qui pourrait le faire. Mais voilà, c’est tout simplement quelque chose qui arrive. On ne sait pas pourquoi, mais ça arrive. Comme si c’était une sorte de destin.” C’est justement sur cela que Chiuri et ses supérieurs misent.
Les succès signés dior ◆ 1994 ‘Lady Dior’ Le premier lui a été offert par Bernadette Chirac, mais, ensuite, la princesse Diana a commandé toutes les versions disponibles qu’elle emportait partout, du gala du MET à New York à un voyage en Argentine. Rebaptisé Lady Dior en hommage à Lady Di, c’est devenu un classique de la maison. ◆ 1999 ‘Saddle’ Conçu par John Galliano et apprécié par Paris Hilton et Carrie Bradshaw, personnage principal de «Sex and the City», ce sac inspiré des cow-boys a défini le style du début des années 90 et connu un second souffle à l’arrivée de Maria Grazia Chiuri chez Dior.Celebs blijven zweren bij een vintage versie. ◆ 2017 ‘Book Tote’ Conçu par Maria Grazia Chiuri pour la collection printemps-été 2018, ce sac cabas dans lequel on fourre tout est repéré dans les aéroports comme lors des fashion weeks de Paris à Milan, en passant par New York. ◆ 2020 ‘Bobby’ Conçu par John Galliano et apprécié par Paris Hilton et Carrie Bradshaw, personnage principal de «Sex and the City», ce sac inspiré des cow-boys a défini le style du début des années 90 et connu un second souffle à l’arrivée de Maria Grazia Chiuri chez Dior.
Vue en plein écran ©Inès Manai
Vue en plein écran Maria Grazia Chiuri. ©Inès Manai
PHOTOS – Défilé Dior automne-hiver 2021–2022 : 5 choses à retenir
Dior dévoilait en ligne lundi 8 mars 2021 sa collection de prêt-à-porter automne/hiver 2021/2022 sous la forme d’un film sorti d’un conte de fée tourné au cœur du Château de Versailles. Gala révèle les 5 points forts de ce défilé très attendu.
Qu’il est bon en temps de crise, de pouvoir se réfugier dans ce qui est familier. Ce lundi 8 mars 2021, pendant leur pause déjeuner, les adeptes de Dior ont pu découvrir en ligne et en live, le défilé automne-hiver 2021-2022 de la griffe de luxe. Et retrouver avec joie les codes stylistiques de la maison française - que Monsieur Dior ouvrait avenue Montaigne en 1946 - remis au goût du jour par la directrice artistique Maria Grazia Chiuri qui les chérit tant. Les vestes sont architecturales, coupées façon Tailleur Bar et captent l’oeil, les tulles superposés s’évaporent en une multitudes de couleurs, les manteaux sont matelassés dans le cannage historique de la maison Dior et les robes du soir, dignes d’un conte de fée, ont des plissés soleil qu’on rêverait de toucher (la robe rouge du final, époustouflante !).
Mais pour Maria Grazia Chiuri, les contes de fée qu’elle explore pour ce défilé, ne sont nullement un moyen d’évasion. Ils servent à contester, à revoir les archétypes : la femme en petites chaussettes blanches (rappelant le monde de l’enfance) dans la mythique Galerie des Glaces du Château de Versailles qui défile ce lundi 8 mars 2021, journée internationale du droit des femmes, c’est la nouvelle femme Dior. Une princesse des temps modernes libérée de tout stéréotype, forte, indépendante, sensuelle, ancrée dans la vie d’aujourd’hui (mais qui respecte tout de même le couvre-feu, en atteste la pendule du final du défilé).
Un défilé inspiré des contes de fée
Pour cette collection, c’est Le Petit Chaperon rouge d’Angela Carter (conte publié dans le recueil The Bloody Chamber, paru en 1979 aux éditions Gollancz) qui inspire ces grandes capuches et ces tenues rouge écarlate illuminant les tissus écossais. Un rouge sensuel qui stylise aussi ces petits manteaux, capes et imperméables. Comme disait Monsieur Dior, « Qu’un manteau rouge est superbe ! », c’était sans connaître ceux que Maria Grazia Chiuri imaginerait après lui, d’une féminité encore plus folle ! Les motifs de roses sortis des archives évoquent l’histoire de La Belle et la Bête (que la directrice artistique affectionne tout particulièrement, notamment dans l’adaptation au cinéma de Cocteau en 1946 de la version de Madame Leprince de Beaumont ). Au beau milieu de ces plastrons, robes manches ballons, dentelles et imprimés, la rédaction de Gala vous détailles les 5 choses à retenir de ce défilé très réussi.
© Dior
- Un décor à la française spectaculaire
Les premières secondes du film suffisent pour comprendre où Dior a pris ses quartiers pour l’hiver. Quoi de plus symbolique pour mettre en lumière les contes de fée, que les miroirs magiques de la Galerie des Glaces du Château de Versailles ?
Un lieu choisi par Maria Grazia Chiuri pour son importance culturelle, manufacturière dans l’histoire de France et pour la renommée du Château de Versailles, connue de tous. La directrice artistique italienne fait appel à l’artiste Silvia Giambrone qui, captivée par le côté psychanalytique d’un miroir, intervient sur la Galerie des Glaces de soixante-dix mètres de long avec son oeuvre intitulée La Galerie des Ombres, soit des miroirs remplaçant les historiques des verriers de Saint-Gobain, en métal et cire, fissurés de cristaux. Magique !
© Dior
- L’imprimé panthère
Les adeptes de Dior sont habitués aux fleurs et à la mythique Toile de Jouy. Dernièrement, ils ont aussi pu s’offrir quelques pièces à l’imprimé Tie and Die (appelé Tie & Dior par la maison), mais étaient-ils prêts à ajouter à leur wish-list de l’hiver prochain, des manteaux, foulards et sacs à l’imprimé panthère ? Par touches sur les accessoires de certains looks, en version bleue ou très assumé sur un long manteau ou un bomber à moumoute, la panthère, sensuelle et féminine envahit les nouvelles pièces phares de Dior.
© Dior
- La dentelle sous toutes ses découpures
Ajourée, en broderies anglaises, découpée au laser sur du cuir, en total look sur une robe chasuble très sage ou à même la peau sur une maille délicate associée au jean parfait (le denim aussi est sublimé sur une bonne quantité de looks cette saison), la dentelle reprend un motif familier de ior et revient en force l’hiver 2021/2022.
© Dior
- Le style militaire
Maria Grazia Chiuri revisite cette saison l’uniforme soldat de plomb et le transforme en une série de manteaux caban à double boutonnage en cachemire bleu, sur d’autres rehaussés de rouge et de blanc, et sur des vestes et bonnets d’aviateur. Les silhouettes sont métalliques, fortes et stylisés. S’il y avait une Dior Army, on la rejoindrait sans hésiter.
© Dior
- L’accessoire star : la chaussure de montagne
Elle n’a jamais été si féminine que sur ce défilé ( l’a t-elle vraiment déja été un jour?). En cuissardes ou en boots façon biker avec des chaussettes, la chaussure de montagne donne un rythme assuré aux mannequins du défilé. Son cuir est brillant et les lacets savamment noués sur des anneaux et crochets, donnent la modernité qu’il fallait. Bien joué !
© Dior
Redécouvrez en vidéo ci-dessous le défilé automne-hiver 2021-2022 de Dior
Crédits photos : Dior
Vous allez aimer ce livre de mode sur le Dior de Maria Grazia Chiuri
“Un rappel pour la Journée International des droits des femmes. En comptant LVMH, Kering, OTB, Richemont et Puig… Seulement 5 postes de directeurs artistiques sur 40 sont tenus par des femmes”, écrit sur Instagram la créatrice roumaine Alexandra Sipa dans un post largement partagé le 8 mars.
Parmi ces 5 femmes, Maria Grazia Chiuri, directrice artistique des collections femmes de la maison Dior depuis 2016. À sa nomination, c’est tout le monde la mode qui s’est mis en branle, s’extasiant à l’idée qu’une femme allait créer des vêtements de luxe pour une telle institution de la mode française.
Mon rêve, mon aspiration, c’est que nous, les femmes, nous nous regardions avec nos propres yeux.
Depuis maintenant 5 ans, face aux adorateurs comme aux détracteurs, elle a pris le parti de défendre une vision de la mode qu’elle revendique féministe, valorisant dans ses créations comme à travers de nouveaux projets de Dior - comme le podcast Female Gaze-, la parole et le travail des femmes qui l’inspire.
C’est ce cercle de femmes puissantes que Chiuri a choisi de célébrer dans Her Dior : La Vision de Maria Grazia Chiuri, le livre de mode qui revient sur sa vision de la femme Dior, publié ce mois-ci aux éditions Rizzoli.
Her Dior, un livre en ôde à la pluralité du féminin
“We should all be feminist” peut-on lire en cover du premier livre dédié au travail de Maria Grazia Chiuri pour la maison Dior. Un clin d’oeil à son t-shirt iconique, présenté lors de son premier défilé pour la griffe française et inspiré par l’ouvrage qui l’est tout autant signé par l’écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie.
La vidéo du jour :
Un point de départ symbolique quant aux engagements de la créatrice qui révèle également l’objet de Her Dior, le livre qu’elle a imaginé autour de ses 5 dernières années de travail. Un ouvrage qui reflète son female gaze, un regard féminin affûté qui se veut reflet de son époque, célébration des cultures diverses, de la liberté des femmes et de l’affirmation de soi.
En tout, ce sont 160 photos captivantes du style Chiuri pour Dior, en couleur et noir et blanc, immortalisées par des photographes amies de la maison que l’on retrouve dans ce livre de mode inédit. “Grâce à ces images, je comprends d’un seul coup d’oeil combien le regard de ces femmes photographes, d’origines, de cultures et de générations différentes, a été important dans mon évolution et mes prises de conscience”, écrit la créatrice dans son texte d’ouverture.
Brigitte Niedermair, Sarah Moon, Bettina Rheims, Nan Goldin, Maya Goded, ou encore Kristin-Lee Moolman… En tout, ce sont 33 femmes photographes qui ont répondu présentes à l’appel de la première femme a dessiner les collections femme de la maison Dior depuis sa création en 1946. “Mon rêve, mon aspiration, c’est que nous, les femmes, nous nous regardions avec nos propres yeux ; et c’est aussi pour cela qu’il m’est fondamental d’utiliser le regard féminin dans les images qui parlent de nous toutes”, écrit encore Maria Grazia Chiuri.
Entre les différentes séries photos, des citations d’artistes fétiches de la styliste comme Claude Cahun, Linda Nochlin ou Leonora Carrington.
Plus qu’un simple coffee table book léché, Her Dior : la Vision de Maria Grazia Chiuri, est un marqueur temporel. Une preuve couchée sur papier de l’époque que vit actuellement la mode, faite de réflexions autour des notions de féminité, de diversité et d’inclusion.
Peut être qu’un jour, dans plusieurs années, une femme ouvrira ce livre et sera surprise de découvrir qu’à une époque, il était rare pour une femme de penser la mode pour les femmes et plus rare encore de s’entourer d’autres femmes pour la faire vivre et évoluer. C’est du moins ce qu’on espère.